Descente d’organes: Une nouvelle approche pour alléger l’opération

Descente d’organes: Une nouvelle approche pour alléger l’opération
18
Juin

Le Pr François Haab, urologue à l’hôpital Tenon, explique les avantages d’une récente technique de vidéochirurgie pour traiter le prolapsus (descente de vessie, d’utérus et d’intestin dans la cavité vaginale).

Pouvez-vous nous expliquer ce qu’on appelle communément une “descente d”organe” ?

Ces descentes, ou prolapsus, concernent la vessie, l’utérus et le rectum qui, normalement, sont maintenus en bonne place par une structure constituée de ligaments et de muscles (périnée). En cas de relâchement de cette structure, les organes risquent de s’affaisser, formant alors une sorte de “boule” dans le vagin. Dans les formes avancées, cette saillie est même palpable au toucher. Sans traitement, cet affaissement risque de s’aggraver en entraînant alors une gêne croissante, car l’organe “descendu” peut sortir à l’extérieur du vagin, provoquant une forte irritation locale et des saignements. Selon une récente étude néerlandaise, 40 % des femmes (à partir de 45 ans) sont atteintes à des degrés divers par cet affaissement.

Quels sont les premiers symptômes d’alerte ?

Une sensation de pesanteur pelvienne, majorée à l’effort, à la station debout prolongée et, d’une manière générale, en fin de journée (l’effort peut aussi être source d’une incontinence). A tous ces signes peuvent s’ajouter des difficultés à uriner ou à aller à la selle. A un stade évolué, une descente d’organe risque de constituer un handicap sérieux

Connait-on la cause de cet affaissement de structure ?

Différents facteurs favorisants ont été identifiés: le plus connu est en rapport avec les accouchements. Plus il y a eu d’accouchements par voie naturelle, plus ils ont été longs, difficiles, plus le risque de développer un prolapsus est important. Certaines activités sportives pratiquées avec excès sont aussi incriminées. Toutes les femmes ne sont pas également concernées par ce risque: il existe chez certaines une fragilité particulière des tissus, et notamment du collagène, qui les rend plus vulnérables.

Comment traite-t-on habituellement ces relâchements de muscles et de ligaments?

Dans les formes les moins sévères, par une rééducation périnéale (des exercices physiques spécifiques) qui permet généralement de réduire la gêne. Dans les formes plus avancées, on intervient chirurgicalement. Pour remplacer ou renforcer les tissus de soutien défaillants, deux approches sont possibles. 1 Par voie chirurgicale classique: après ouverture de l’abdomen, le geste consiste à fixer un petit ruban qui permet d’accrocher l’utérus ou la vessie (l’ablation de l’utérus est discutée au cas par cas). 2 Par voie naturelle en intervenant par le vagin. Là encore, le praticien fixe un ruban de soutien, mais, pour la patiente, l’opération est beaucoup moins lourde. Seul inconvénient: il y a des risques de récidive. Les résultats obtenus avec la technique chirurgicale classique (80 % de guérisons) se sont révélés, dans la durée, meilleurs que ceux observés après une chirurgie par voie naturelle.

Pour alléger les suites opératoires, tout en conservant l’efficacité de la technique par voie abdominale, on a mis au point une nouvelle approche. En quoi consiste-t-elle?

On utilise là un procédé de vidéochirurgie. On n’ouvre plus le ventre mais on opère, au travers de trocarts (petits tuyaux) introduits dans l’abdomen, avec de longs instruments. Une minuscule caméra, glissée dans un des trocarts, permet de reproduire le champ opératoire agrandi sur un écran. Le geste chirurgical, lui, est exactement le même que celui pratiqué lors d’une opération conventionnelle.

Pour la patiente, quelles sont les suites?

Comme elle souffre moins qu’après une intervention “à ciel ouvert”, elle prend moins d’antalgiques. Sa mobilisation est plus rapide: dès le lendemain, elle peut se lever et marcher. L’hospitalisation ne dépasse généralement pas trois jours et la convalescence est plus courte: deux semaines au lieu d’un mois.

Quels résultats obtient-on avec cette chirurgie mini-invasive?

Différentes études publiées en 2004 (dont celle citée dans le “British Journal of Surgery” ou le “Journal européen d’urologie”) démontrent que cette vidéochirurgie donne, en termes de guérison, les mêmes résultats que ceux obtenus par chirurgie classique. Aujourd’hui, avec un recul de deux ans, on peut parler d’une véritable technique de référence.

Et, au niveau de la chirurgie utilisant la voie vaginale, où se situent les avancées?De nombreux travaux de recherche sont en cours pour parvenir à limiter le risque de récidive qui constitue la principale faiblesse de cette technique par voie naturelle. On voudrait pouvoir la proposer aux femmes les plus jeunes. L’enjeu porte sur la mise au point de nouveaux matériaux de soutien, bien tolérés, évitant tout problème d’infection et de mauvaise cicatrisation. D’ici à un an, on devrait déjà avoir obtenu des résultats concrets.

 

Propos recueillis par Sabine de La Brosse pour Paris Match 18/03/2007